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Gérer et faire face à la critique

| Kyrian Malone | Les conseils d'écriture

Gérer et faire face à la critique

A l'ère des réseaux et du numérique où les haters donnent leurs avis sur tout, gérer la critique quand on est un jeune auteur ou même un auteur confirmé, peut s'avérer complexe.

Et si je vous disais que la créativité se décuple sous la critique et la pression ? Bien sûr, vous ne me croiriez pas dans l'instant et vous devriez prendre le temps de réfléchir à un cas qui vous concerne. C'est là toute l'idée de cet article qui m'est venu suite au post de deux autrices ce mois-ci qui dénonçaient chacune leur tour des avis excessifs et insultants sur leurs romans.

Comme bien trop souvent, les auteurs les plus sensibles ont des réactions légitimes immédiates : ils ressentent colère, indignation et déception. Un trio gagnant pouvant conduire à l'abandon de l'écriture. Et c'est précisément ce qu'il ne faut pas faire !

Si vous hésitez à poursuivre l'écriture pour ne plus écoper de ces avis toxiques qui vous blessent et vous découragent, alors cet article est pour vous et vous reboostera à bloc, car croyez-le ou non, votre meilleure énergie pour avancer et devenir une meilleure autrice ou un meilleur auteur viendra aussi de ces critiques négatives qui ont un incroyable pouvoir qu'eux-mêmes ne soupçonnent pas : celui de vous rendre plus déterminé, performant et créatif.

 

Sommaire 

1. Les réactions de votre cerveau face à la critique

Vous vous demandez quel rapport avec votre cerveau et votre situation ! Vous allez comprendre...

Je regarde en ce moment un reportage sur Netflix : "Le cerveau en Bref" et un épisode m'a interpellée puisque dédié à "la créativité" ! Toutes mes conclusions sur les raisons de mes performances sous pression (qui me semblaient d'ailleurs totalement absurdes) ont été résumées, et surtout expliquées, dans cette série-reportage.

Ce dernier épisode explore comment la pression et la critique peuvent agir comme catalyseurs pour la pensée créative. Le reportage démontre que, contrairement à la croyance populaire, la critique n'est pas toujours un frein à la créativité, mais peut en réalité la stimuler. Cet énoncé m'a amenée à faire d'autres recherches sur le sujet et ce que j'ai trouvé est juste fascinant.

Lorsque vous êtes stressé, l'amygdale dans votre cerveau signale à l'hypothalamus de réagir. Cela déclenche une cascade d'hormones, entraînant la production de cortisol par vos glandes surrénales, ce qui vous prépare pour une réponse de "lutte ou fuite"​​ (voir article ici). En situation de "stress non menaçant", comme recevoir une critique, cette énergie ne se traduit pas par une action physique mais peut potentiellement être redirigée vers la créativité​​ (voir autre article ici). La critique "ouvre" donc des zones du cerveau normalement moins actives et c'est à ce moment précis que toute la magie opère  : ces contrariétés forcent les créateurs à penser différemment, à sortir des sentiers battus et à explorer de nouvelles avenues de pensée.

Une autre étude démontre même qu'un groupe de créateurs soumis à une ambiance beaucoup trop positive est totalement contreproductif ! Qu'en pensez-vous ? Le positif permanent n'est pas un moteur de créativité et de progression, contrairement au négatif. Et si la critique est douloureuse, elle est aussi une invitation à observer notre travail sous un nouvel angle, à défier nos propres limites et à utiliser notre cerveau de manière plus innovante et originale. C'est dans cet espace inconfortable que de nombreuses personnes trouvent l'étincelle de leur prochaine grande idée ou avancée ; c'est aussi quand on les attaque, que les créateurs vont instinctivement vouloir améliorer leur art et se dépasser !

Bien sûr, chaque écrivain a sa propre limite de tolérance face aux critiques négatives et idéalement, un bon dosage positif/négatif est préférable pour équilibrer notre estime de soi... Certains auteurs réagissent après un ou deux commentaires désobligeants, tandis que d'autres ne vacillent qu'après en avoir reçu une dizaine. Il y a aussi ces artistes qui, malgré une vingtaine de retours négatifs, restent convaincus de leur excellence. Ces derniers refusent de douter de leur talent et ne chercheront jamais à s'améliorer car ils se considèrent au-dessus de toute critique.

Voir aussi : Les (pseudos) critiques qui nous critiquent ! (attention, forte dose de sarcasmes)

2. Les critiques d'anonymes

N'oubliez pas que les critiques que vous recevez sont celles de parfaits inconnus qui pensent vous connaître et vous jugent via le sublime écran de fumée qu'est... leur écran !

Que les critiques soient positives ou négatives, le hic, c'est que vous n'êtes jugés qu'en surface, sur l'idée que les gens se font de vous d'après ce qu'ils lisent ou "entendent". C'est le lot de toutes les personnes dites "publiques". Cette évaluation superficielle ne reflète pas la complexité de vos pensées, de vos sentiments ou de vos intentions. Qu'elle soit positive ou négative, elle s'appuie sur une image partielle, déformée, qui conduit toujours à une impression erronée de votre véritable identité.

Juger sur la seule base des interactions qu'ils lisent sur les réseaux sociaux c'est un peu comme s'ils évaluaient la qualité d'un restaurant en ne goûtant que la sauce piquante ou la chantilly du dessert : ils manquent tout le menu et repartent avec une très mauvaise ou une très bonne impression... Dans les deux cas, l'avis est faux.

Le principal problème, c'est qu'il est nécessaire d'avoir une certaine maturité intellectuelle pour savoir que les réseaux ne montrent qu'une version exacerbée et déformée des réalités et que tout ça n'est qu'un grand jeu de rôle (et parfois de propagande) où le critique oublie le principal : ce qu'il critique et sa façon de critiquer en disent plus long sur lui que sur la cible critiquée. Et quand la critique est négative, accusatrice ou simplement méchante, tous les témoins diront qu'il s'agit de jalousie et d'envie sans même chercher si la critique est fondée !

3. Les critiques négatives au fil du temps

Plus vous persisterez dans votre art qu'est l'écriture, plus vous réussirez, plus vous vous démarquerez, plus vous recevrez de critiques, qu'elles soient positives ou négatives. Cela vient avec la popularité, le bouche à oreille et surtout votre créativité et votre originalité. Car on ne parle pas des gens sans talent ni de ceux qu'on ne remarque pas. Ceux-là sont invisibles et sombrent dans les oubliettes très rapidement.

Ces 15 dernières années j'ai croisé beaucoup d'autrices qui ont écopées de critiques injustifiées, acides, acerbes ou carrément vulgaires, mais bonne nouvelle : il y a des constantes remarquables les concernant. Les autrices qui ont reçu le plus de commentaires négatifs sont très souvent :

  • Les autrices les plus commentées,
  • Les autrices les plus prolifiques,
  • les autrices les plus actives,
  • les autrices les plus créatives,
  • les autrices qui se renouvellent,
  • les autrices qui reçoivent les meilleurs avis du comité de lecture,
  • les autrices dont les ventes augmentent au fil des publications !

C'est plein d'ironie n'est-ce pas ? Ni les autrices, ni les critiques n'ont conscience que ce venin distillé dans le but de leur nuire, produit précisément l'effet inverse.

4. Parlez-en en bien ou en mal, mais parlez-en

Le plus fascinant est donc de constater que l'effet escompté par les critiques négatives est à l'inverse de celui désiré. L'adage "parlez-en en bien ou en mal, mais parlez-en", se confirme, peu importe que le "parlez-en en mal" soit vérité ou mensonge.

Pourquoi ? Parce que les auteurs ciblés par les critiques poussent parfois des "coups de gueule" pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme des injustices, et que les lecteurs empathiques et témoins de ces injustices, montent au creneau pour intervenir et les défendre.

Résultat : les auteurs obtiennent non seulement l'empathie de leur public, mais aussi de nouveaux lecteurs curieux de découvrir si la critique est justifiée.

N'avez-vous jamais vu sur des groupes de lecture des interventions négatives sur des ouvrages pour constater la même réaction :

Tu viens de me donner envie de découvrir l'histoire / l'auteur / l'intrigue / la bio, etc...

Cela vous semble-t-il totalement contre-intuitif ?

C'est un phénomène psychologique connu sous le nom de biais cognitif. En particulier, le biais de confirmation qui joue un grand rôle sur les réseaux sociaux. Face à un débat générant une émotion négative, les gens ont une impulsion irrésistible de partager leur opinion, en commentant ou en cliquant sur "j'aime" ou "je n'aime pas", pour soutenir une idée qui rejoint leurs valeurs et leurs visions. Quand il s'agit de réagir à des critiques qui semblent injustes, ceux qui apprécient un auteur ou une oeuvre vont donc réagir de deux manières :

  • soit en souhaitant lire le livre critiqué pour pouvoir donner leur avis à leur tour et "valider" ou "invalider" le propos,
  • soit de donner leur soutien à l'auteur sans même avoir lu le livre...

Petite astuce utile : quand vous recevez une mauvaise critique, pensez toujours à ajouter le lien vers votre livre critiqué. Vous obtiendrez :

  • Plus de ventes
  • Plus de commentaires

C'est un effet "pervers" pour le critique qui souhaite nuire et qui n'imagine pas une seconde qu'une telle chose soit possible. Et pourtant nous connaissons tous des exemples de médias vivement critiqués (film, série, musique, personnalité) qui nous ont poussé à vouloir en savoir plus pour nous faire notre propre opinion sur le débat ou ses origines.

5. Mais pourquoi tant de haine sur les réseaux ?

orangina-rouge-france-mechant Gérer et faire face à la critique

Beaucoup de personnes ressentent le besoin de vous annuler pour... se confirmer elles-mêmes !

... confirmer aussi leurs idéaux, leurs valeurs, leurs amies, leurs croyances, etc... ce qui leur permet d'affirmer leur propre existence ou identité, et de donner du poids à leur voix étouffée par leurs propres insécurités et leur manque de confiance.

En vous critiquant, en vous jugeant, elles cherchent à se rassurer, à se convaincre qu'elles sont en possession de la vérité et surtout d'une supériorité morale. C'est une sorte de cri du coeur qui dit "Regardez-moi, je suis mieux, je vaux mieux, je pense mieux, je suis plus légitime !"

Elles, ou leurs idéaux, trouvent dans cette démarche une forme de validation, un écho à leurs valeurs qui, sans cette opposition à vous, resteraient peut-être inaudibles, même à leurs propres oreilles. C'est un cercle vicieux où la critique devient un outil pour renforcer leur identité, leurs croyances et leurs préjugés. Elles ne sont pas ouvertes au débat, à la compréhension, parce qu'incapable d'ouverture d'esprit.

"Les critiques ne sont pas méchants, ils sont malheureux." - Jean Cocteau

Ca sonne animal et primitif, n'est-ce pas ? C'est pourtant la base de l'instinct primaire de survie de tous les mammifères, l'éternelle guèguerre de territoire entre congénères d'une même espèce telle qu'on en voit dans les matchs de foot et qui pourrait se résumer en un raccourci simple : "je t'affronte et je te tue pour prendra ta place et exister".

Au lieu de lutter physiquement contre vous parce que vous êtes hors de portée (et que concrètement, face à vous, 99% de ces personnes n'essaieraient pas de vous affronter), ces individus souhaitent vous "tuer" symboliquement par des mots, des jugements, pour affirmer leur propre place dans ce monde qui ne les voit pas ou ne les considère pas.

"La critique est quelque chose que nous pouvons éviter facilement en ne disant rien, en ne faisant rien, et en étant rien." - Aristote

Prenez conscience de deux choses :

  1. Ces gens mettent en arrêt leur propre vie pour vous critiquer parce que vous avez de l'importance dans la leur. Absurde n'est-ce pas ? Mais prenez les choses sous cet angle : consacrer du temps et de l'énergie à vous critiquer est en soi une reconnaissance de l'importance que vous avez dans la vie du critique, même si cette importance est exprimée de manière négative. Ne serait-ce pas justement plus triste de ne susciter aucune émotion ?
  2. En cherchant à vous annuler, ils s'annulent eux-mêmes, car leur énergie est détournée de leur propre croissance personnelle. Au lieu de cultiver leurs talents ou de poursuivre leurs passions, ils se consument dans l'acte de la critique. Chaque moment passé à vous critiquer est un moment perdu pour leur propre épanouissement. Ils deviennent l'ombre de leur propre potentialité qui est obscurcie par l'obsession de vous diminuer. En fin de compte, cette tentative d'éteindre votre lumière ne fait qu'assombrir leur propre monde, limitant leur capacité à briller par eux-mêmes.

6. Des héroïnes et des héros de leur propre histoire... souvent tristes

Chaque personne vit sa propre histoire dans laquelle elle occupe une place centrale : celle de l'héroïne ou du héro qui a sa trame (son paramétrage social et éducatif), son narrateur (l'ego), et ses personnages principaux et secondaires (famille, amis, collègues, etc).  En vous choisissant comme leur "anti-héros" (ennemi) - donc comme personnage principal - ces personnes s'inventent une fonction dans un récit où elles se sentent puissantes et pertinentes. Vous savez sûrement que sans anti-héros, les héros n'existe pas. Donc le besoin de vous affronter, et qui ne concerne qu'elles-même, est une tentative de donner un sens à leur propre récit/vie, où chaque critique/attaque est un chapitre ajouté à leur épopée personnelle.

Cette narration interne est souvent un signe d'insatisfaction profonde ou d'un manque d'accomplissement personnel. Au lieu de s'engager dans des activités constructives ou créatives, elles choisissent la facilité de la critique et du rejet, car construire demande plus d'effort et de vulnérabilité que de démolir.

Ce type de comportement trouve souvent ses origines dans des expériences traumatisantes antérieures. Ces personnes ont pu traverser des périodes difficiles où elles n'ont pas reçu la reconnaissance ou l'approbation qu'elles espéraient ou, dans des cas encore plus graves, elles ont pu être victimes d'abus, ce qui a altéré leur estime d'elle-même et laissé un vide intérieur. Cette lacune profonde est parfois désignée sous le terme de "faille narcissique", fréquente chez ceux qui ont subi des violences, souvent dès l'enfance.

Un expert en santé mentale pourrait identifier ce comportement comme une incapacité à se valoriser autrement qu'en dénigrant autrui, une tendance ancrée dans des traumatismes vécus pendant l'enfance ou l'adolescence. Ces individus, ayant été blessés dans leur jeunesse, tendent malheureusement à reproduire ce schéma destructeur de façon inconsciente et vous êtes malheureusement la cible.

"L'arbre qui tombe fait plus de bruit que la forêt qui pousse." - Proverbe tibétain

En s'érigeant en héros de leur propre histoire, ces individus pendre être capables de reprendre le contrôle de leur vie et ne trouvent de valeur que dans la confrontation / la destruction, et non dans la création. Le terme "faille narcissique" est employé précédemment car il fait référence à un Narcisse brisé, symbolisant une estime de soi endommagée et un reflet altéré de soi-même. Pour compenser ce manque, ces personnes tentent de "briser le miroir" des autres, c'est-à-dire de perturber ou de dévaloriser l'image que les autres ont d'eux-mêmes. (Attention, le but de ces explications n'est pas d'excuser ces personnes, mais d'expliquer ce qui les poussent à agir comme elles le font, surtout quand leurs attaques sont répétées...)

Leur propre histoire manque de substance parce qu'elle est basée sur l'opposition plutôt que sur l'authenticité ou l'originalité qu'ont de nombreuses écrivaines qui se démarquent de la masse.

En fin de compte, leur quête pour se définir à travers cette lutte contre l'anti-héros que vous incarnez les empêche de devenir les véritables héros de leur propre vie, ceux qui surmontent les défis réels et apportent une contribution positive au monde qui les entoure.

Pour la petite histoire : j'ai plusieurs détracteurs qui posent des avis 1 étoile sur pratiquement tous mes livres numériques sans exception. Or, depuis plusieurs années, je publie également mes romans sous deux autres pseudonymes. Ces mêmes détracteurs - qui détestent mes livres - ont posé des avis élogieux sur ces autres romans que je n'ai pas signé sous mon nom. Amusant, n'est-ce pas ?




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