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Nos 20 questions à Frédéric Adam-Foucault

| Chantal_Trembley | Interviews de nos autrices et auteurs

Nos 20 questions à Frédéric Adam-Foucault

Qu’est ce qui vous a donné envie d’écrire ce livre ?

En 2005, lorsque j’ai intégré l’association Act Up Paris, j’ai été amené à rencontrer des travailleurs du sexe. En France, l’article L50 de la loi relative à la sécurité intérieure venait d’être mis en application. Ce texte condamne le racolage passif et faisait des personnes prostituées les premières victimes de la répression. Je me suis beaucoup interrogé sur ces questions. Etait-ce normal ? Devait-on laisser les gens vivre cette forme de sexualité ? Je n’en savais rien. Puis, j’ai songé à ma propre jeunesse, à la difficulté de trouver un emploi ou un appartement. J’ai aussi pensé à l’intérêt que me portaient certains hommes, attirés par ma fringante jeunesse. Pour certains d’entre eux, je n’ai parfois était qu’un jouet sexuel. A la lecture de« King Kong Théorie » de Virginie Despentes, le témoignage livré rejoignait celui des travailleurs et travailleuses du sexe que je côtoyais à l’époque : « les hommes ne sont jamais autant respectueux que lorsqu’ils paient ». Dès lors, je me suis projeté dans l’écriture d’un texte qu’est devenu ce roman. De même, mes relations difficiles avec ma mère ont été une source d’inspiration. De nos jours, beaucoup trop de jeunes se retrouvent exclus de leurs structures familliales en raison de leur homosexualité. Finalement, le parcours initiatique d’Arnaud pourrait très bien être celui de chacun d’entre eux.

Quels ont été vos processus d’écriture, de l’idée à la rédaction jusqu'à la finalisation ? Combien de temps cela vous a-t-il pris ?

L’écriture des premiers chapitres a été relativement fluide. A l’époque, je travaillais à domicile comme Chargé de promotion web et médias d’une discothèque, et, je manageais mon groupe « Mauvais-Genre ». J’avais beaucoup de temps libre, et, obsédé par ce personnage fantasmatique, je me devais de canaliser mon imagination pour raconter une histoire, une tranche de vie. Afin de rédiger un récit crédible, j’ai eu besoin d’être en phase avec mes émotions. Il s’agissait d’un travail d’introspection tel qu’un acteur préparerait son rôle  avant le tournage d’un film. J’ai questionné mon ressenti, mes joies, mes peurs et mes angoisses. J’ai pris mon temps pour rédiger ce texte. L’écriture m’avait rendu dépendant. En parallèle, je bloggais quotidiennement, et, j’avais besoin d’écrire d’une façon différente. Cela m’a pris deux ans.

Quelle(s) difficulté(s) avez-vous rencontré pendant l’écriture de ce livre ? Comment les avez-vous surmontées ?

Comme je l’affirmais précédemment, la principale difficulté a été de trouver la justesse des émotions. Parfois, je n’étais pas en phase avec ce que je souhaitais développer dans l’intrigue. Il m’est arrivé de réécrire plusieurs fois certains passages, avec le sentiment désagréable de me heurter à un mur. Etant quelqu’un d’exigeant, j’ai dû faire des pauses de plusieurs semaines afin de m’accorder le recul nécessaire pour reprendre le cours de l’histoire. De même, ayant travaillé la rédaction comme un jeu d’acteur, il m’est arrivé de me sentir vidé de toute émotion, ou, au contraire, d’être à fleur de peau à l’issue d’un moment d’écriture. De même, il m’est arrivé d’avoir peur de ne pas être cohérent. C’était la première fois que je rédigeais un texte aussi long. Les encouragements de mes ami-e-s et de mon mari m’ont énormément apporté.

Avez-vous eu envie de toucher un lectorat particulier ? Des jeunes femmes, des hommes ?

Pour être honnête, je ne me suis jamais vraiment posé la question. J’avais envie d’écrire cette histoire. Le véritable challenge était de dépasser le style de mes  chroniques sur mon blog, donc mon lectorat. A l’époque, cela concernait des personnes queers ou LGBT, parfois quelques femmes hétérosexuelles. Ecrire et lire sont indissociables du verbe « aimer », à l’impératif, cela ne fonctionne pas. Alors, si j’avais à toucher des personnes en particulier, leur genre m’importe peu, pourvu que la thématique et mon style stimulent leurs envies.

Avez-vous toujours eu envie d’être écrivain ?

Il s’agissait de mon rêve d’enfant. Dès que j’ai su écrire, je me souviens avoir fait lire à ma mère et à mon parrain ma toute première nouvelle. Je ne sais plus ce dont il était question, c’était il y a fort longtemps ! Du plus loin que je m’en souvienne, ça remonte à cette époque. Je me revois encore assis au bureau de ma chambre griffonnant des pattes de mouche sur un cahier de brouillon au papier de mauvaise qualité. J’ai toujours voué une certaine admiration pour les Auteur-e-s. Avoir grandi dans la solitude de la campagne m’a amené à lire beaucoup pour occuper mes longues journées. Cela me faisait rêver.

Quand écrivez-vous ? Avez-vous un rituel d’écriture, des horaires ?

Tout dépend de ce que j’écris. Lorsque j’ai envie de partager un ressenti, une émotion, quelque chose de personnel sur les réseaux sociaux, j’aime écrire en matinée, souvent assis dans mon bureau. C’est une pièce que j’affectionne particulièrement car je m’y sens serein. J’ai écrit sur une porte « les murs blancs sont une page libre ». Cela correspond à mon état d’esprit en général. Parfois aussi, il m’arrive d’assister à des moments du quotidien que j’ai envie de partager pour confronter ma réalité à celle des autres. Ces derniers temps, j’ai souvent utilisé la fonction note de mon Iphone dans le métro. Les trajets passent ainsi beaucoup plus vite. Pour les textes plus longs, l’idéal est de me déconnecter du monde, en changeant de cadre. Dans ce cas, je deviens beaucoup plus productif et je ne suis pas parasité par le superflu. C’est aussi idéal pour se ressourcer.

Que représente l’écriture pour vous ?

L’écriture représente beaucoup pour moi. Je la considère comme le plus beau médium à exploiter au sens où, dans la finalité artistique, je n’ai pas à monter des projets collectifs comme ce fût le cas pour mes courts-métrages. Mon écriture est multiple, diverse. Etant assez réservé, elle me permet dans bien des cas d’exprimer davantage de choses que je n’en laisse paraitre. Elle est aussi une arme. Choisir ses mots les rend irréfutables, irrévocables. Le seul cas de figure dans lequel je n’aime pas m’y adonner est le monde professionnel : il n’y a rien de plus rébarbatif et ennuyeux que les courriers administratifs !

Aimez-vous lire ? On dit souvent qu’il faut beaucoup lire pour écrire, qu’en pensez-vous ?

J’avoue lire beaucoup moins de roman que par le passé. Il fût une époque où je dévorais une dizaine de livres par moi. A cette période, j’étais étudiant et n’avais ni la télévision ni internet à la maison, je n’étais pas happé par la facilité. Même en lisant un roman de gare, on stimule l’imaginaire. Je ne sais pas combien de livres j’ai pu lire dans ma vie : des centaines ? des milliers ? Je ne sais pas. L’objet me fascine. S’il faut beaucoup lire pour écrire ? Oui, j’en suis absolument convaincu. On n’invente pas son style, on pioche chez les uns et les autres avant de trouver ce qui sera notre signature.

Avez-vous des projets d’écriture ? Pouvez-vous nous en parler ?

Après « Insère-toi », j’aimerais beaucoup publier la suite des aventures d’Arnaud. Je me suis beaucoup attaché à ce personnage, et, j’ai plaisir à le projeter dans d’autres situations. Comme moi, il évolue, change. Avec les années, nous ne sommes plus les mêmes, sans vraiment diverger de ce que nous sommes. J’ai aussi un projet de biographie en partenariat avec un Dj parisien, mais pour l’heure, il est encore difficile de nous coordonner.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à nos lecteurs rêvant de devenir écrivain ?

Tout d’abord : se faire plaisir ! Sans cela, il n’y a pas de sérénité. On a tous des craintes existentielles. On ne pense pas en être capable. Que nenni ! Il faut aussi s’accorder le temps de progresser. On commence par rédiger des notes, puis des nouvelles, des billets de blog, et, un beau jour, on tient de quoi faire un roman. Il faut toujours persévérer. La confiance en soi est un carburant essentiel.

Que diriez-vous à vos lecteurs et peut être futurs lecteurs ?

Je leur souhaite autant de plaisir à me lire que j’en ai ressenti en écrivant ! Aussi, d’en parler autour d’eux. Honnêtement, je ne sais pas, c’est encore le grand saut pour moi.

Essayons de mieux vous connaître en piochant dans le questionnaire de Proust.
Quelle est la qualité que vous préférez chez une femme ?
Et chez un homme ?

A part au lit, je ne fais pas de différence de traitement entre les hommes et les femmes ! De ce fait, j’aime les gens entiers, généreux et honnêtes. De préférence tournés vers les autres et bienveillants, car ce monde souffre cruellement du manque de cet état d’esprit.

Votre principal défaut ?

Je suis impatient. Je n’aime pas attendre, c’est viscéral !

Votre rêve de bonheur ?

Je suis un éternel rêveur. Jusqu’à présent, j’ai eu la chance, progressivement, de les voir se réaliser. Le seul que je ne réaliserai pas est d’avoir des enfants mais j’ai d’autres sources de joie.

Vos héros dans la vie réelle ?

Ma grand-mère maternelle pour sa force et son courage. Il aurait été plus facile de répondre si vous m’aviez posé la question dans le domaine de l’imaginaire. J’aurais répondu Batman pour son humanité ! J’en suis si fan que son logo est tatoué sur mon cou !

Qu’aimez-vous lire ?

Des romans, des nouvelles, des bandes dessinées... Je ne suis pas fermé, par contre, j’aime choisir mes lectures. Je préfère qu’on me conseille une œuvre plutôt que la recevoir en cadeau. J’aime voir mon envie stimulée.

Un auteur fétiche ?

Pourquoi un seul ? Virginie Despentes pour son franc-parler. Armistead Maupin pour ses chroniques. Ralf König ou Ptit Luc pour leurs Bandes dessinées. Paulo Coelho pour sa philosophie.

Un livre de chevet ?

Pourquoi un seul livre ? J’hésite. Celui qui m’a le plus marqué ces derniers temps est « La vie sexuelle des super héros » de Marco Mancassola.

Connaissez-vous le Canada ?

Non, mais maintenant que j’ai enfin pu achever de visiter l’Europe, je ne désespère pas de traverser l’Atlantique. J’espère avoir l’occasion de vous rendre visite. Les Canadiens et Québequois rencontrés  à Paris sont des gens merveilleux. C’est, la plus belle des invitations à découvrir un pays !




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