Comment fonctionne un comité de lecture ?
Suite à notre petite annonce et aux diverses interventions de personnes sensibles, mal informées, et heurtées par notre appel à bénévoles, nous souhaitions rédiger un court article pour expliquer le fonctionnement - et les fonctions - d'un comité de lecture dans la plupart des maisons d'édition. Il est vrai que certaines évidences ne le sont pas pour tout le monde et des personnes à l'imagination fertile peuvent supposer que les membres de ces comités sont des esclaves maltraités, abusés, enchaînés à des manuscrits qu'ils doivent lire dans leur intégralité, sous la contrainte et ce, jusqu'à épuisement...
Découvrez le sommaire
- Définition : Qu'est-ce qu'un comité de lecture ?
- Ce qu'un lecteur de comité de lecture ne fait pas
- Quelle est sa fonction ?
- Comment le lecteur partage-t-il son avis ?
- Un lecteur doit-il écrire une chronique de livre ?
- Quelles sont les contraintes ?
- Les lecteurs des comités sont-ils payés ?
- Et si c'était rémunéré ?
1. Définition : Qu'est-ce qu'un comité de lecture ?
En quelques mots, le comité de lecture regroupe des lecteurs qui vont lire un roman (ça fonctionne avec un article, une revue, une pièce de théâtre) pour partager leur avis général sur le fond et la forme. Parfois, les lecteurs se réunissent pour débattre de leur lecture, parfois, ils se contentent de remplir un document qui récapitule ce qu'ils ont apprécié ou pas apprécié.
2. Ce qu'un lecteur de comité de lecture ne fait pas
Un lecteur d'un comité de lecture n'est pas :
- Correcteur
- Chroniqueur
- Bêta-lecteur
3. Quelle est sa fonction ?
Le lecteur d'un comité de lecture a pour mission de dire à l'éditeur (par voie orale ou écrite) ce qu'il a aimé et ce qu'il n'a pas aimé (ou moins aimé). Le lecteur est comparable un client lambda qui teste un produit quelconque et donne son avis sur les points positifs et points négatifs du produit afin d'aider le "fabriquant" à améliorer ledit produit.
4. Comment le lecteur partage-t-il son avis ?
La plupart des maisons offrent aux lecteurs de leur comité ce qu'on appelle une "grille de lecture". Celle-ci réunit un ensemble de points, généralement sous forme de questions, à évaluer. Les membres du comité doivent répondre aux questions et/ou ajouter une note.
Exemple tiré de notre questionnaire : "le titre de l'oeuvre vous semble-t-il pertinent ?"
Cette question est simple, et d'une importance capitale pour déterminer si l'auteur a bien intitulé son oeuvre et permettra éventuellement de reformuler le titre.
La grille de lecture doit être complétée que le lecteur ait (ou non) terminé le roman. La plupart des maisons d'édition n'exigent pas de leurs lecteurs de lire l'intégralité de l'histoire. Généralement, après 20 ou 30 pages, le lecteur peut arrêter sa lecture et prévenir la maison d'édition des raisons (fautes nombreuses, mauvais français, problèmes de style, manque d'intérêt, incapacité à se plonger dans l'histoire, etc...). A noter que certains lecteurs préfèrent malgré tout, de leur propre chef, terminer les livres qu'ils commencent et n'hésitent pas à souligner dans leur grille les points à travailler.
5. Un lecteur doit-il écrire une chronique de livre ?
Non. Un lecteur doit formuler un avis comme tous les lecteurs lambda qui achètent un roman, avec ses mots, sa sensibilité. Un lecteur n'est pas un chroniqueur. Il n'est pas tenu de lire un livre de A à Z et d'en faire une étude ou une analyse approfondie.
6. Quelles sont les contraintes ?
Les contraintes des comités changent d'une maison à l'autre, mais généralement elles sont peu nombreuses. La plus courante consiste à rendre l'avis dans un délai imparti. Cela peut varier de 2 semaines à 8 semaines, dépendamment des délais de traitement que la Maison d'édition s'impose en fonction de sa croissance et de ses objectifs.
Dans la plupart des maisons, l'offre est sans engagement, aux bons plaisirs et souhaits du lecteur qui peut se retirer quand il le souhaite, prendre des vacances, revenir à sa guise selon ses disponibilités et impératifs...
7. Les lecteurs des comités sont-ils payés ?
Nous savions que le bénévolat était courant dans notre niche, mais nous avons souhaité en apprendre plus en externe et avons directement posé la question dans un groupe indépendant à notre circuit pour prendre connaissance de ce qu'il se faisait dans les petites et moyennes maisons (hors maison LGBT) et sur des niches plus étendues que la notre, donc "hétéronormatives".
La réponse est simple : NON, les lecteurs des comités de lecture ne sont pas payés. Seule une lectrice a préféré me contacter en privé pour me citer les noms des maisons d'éditions grand format qui payaient certains de leurs lecteurs.
Les personnes sensibles, scandalisées, outrées poseront les jugements suivants: "Ce n'est pas éthique, c'est immoral, ce n'est pas dans mes valeurs, c'est de l'esclavagisme, etc, etc..."
À chacun de se faire son avis sur la question.
Pour la majorité des gens, lire est un plaisir, ni un travail ni une contrainte. S'ils postulent spontanément ou sur demande, dans ces comités, c'est qu'ils ont le temps, l'envie et la volonté de contribuer, à court ou long terme, à ce type d'activités.
Pour lire gratuitement et contribuer à la vie d'une petite maison, la plupart des lecteurs ne se posent pas la question de la rémunération. C'est pour eux un échange de bons procédés. Certains lecteurs sont de consommateurs très gourmands de livres. Ci-dessous, 61% des lecteurs sondés dans notre Café littéraire lisent pour certains entre 3 et 7+ livres par mois. En format ebook, cela leur coûte minimum entre 30 et 70€ par mois, soit entre 360 et 840€ par an, un budget important pour de nombreux foyers, surtout en considérant la crise économique majeure dans laquelle nous avançons et l'effondrement du pouvoir d'achat.
8. Et si c'était rémunéré ?
Nous avons réfléchi à cette option et avons imaginé un scénario tout simple : admettons que toutes les maisons - petites et grandes - rémunèrent ses lecteurs. Dans ce scénario, l'éditeur est capable de rémunérer chaque lecteur sur un petit forfait de 25$ la lecture. Rien d'extraordinaire n'est-ce pas ? 25$ c'est peu, c'est presque risible du point de vue du lecteur ? 25$ pour une lecture d'un roman court équivaut environ à cinq heures de lecture, donc cela revient à maigre salaire de 5$ de l'heure, c'est à dire 3.66€. Une misère.
Si en moyenne un roman passe entre les mains de 3 à 5 lecteurs dans un comité de lecture, côté éditeur, cela coûterait entre 75$ et 125$.
Tout le monde connait la proportionnalité des acceptations dans les grandes maisons, le ratio est d'environ 1 pour 1000. 1 roman est publié pour 1000 romans soumis.
Le calcul en reviendrait donc, pour une ME traditionnelle, à payer avant même la diffusion, entre 75.000 et 125.000 dollars (soit 91.000€ avec le cours du jour) de frais de lecture pour dégotter LA pépite qui sera acceptée.
La démonstration vous parle-t-elle suffisamment pour mieux comprendre pourquoi très peu de maisons d'édition - même parmi celles qui ont les plus gros moyens - rémunère leur comité de lecture ?
Car la question de l'investissement est importante. Toutes les maisons ont des contraintes économiques et doivent donc se demander : quelles sont les chances pour que ladite pépite rembourse les frais avancés compris entre 75.000 et 125.000 dollars ? Et là nous ne parlons pas des frais de correction, de couverture, de promotion, etc... mais juste de lecture.
En espérant que ce court article vous aura aidé à mieux comprendre le fonctionnement d'un comité.
Si vous souhaitez devenir membre de notre comité de lecture, n'hésitez pas à nous contacter.
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