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Sous le choc, les protagonistes se dévisageaient en silence. Horn se massa le cou en fixant Constance qui contemplait ses propres mains.
- Vous êtes complètement folle, finit-il par lâcher tout en reculant d’un pas.
Lentement, sa locataire leva la tête et planta son regard noir dans le sien. Elle éprouvait un intense mépris pour cet homme dont la vraie nature venait de lui être révélée. Isabella saisit Constance par le bras et exigea des explications sur ce qui venait de se dérouler.
- Je sais tout…
- Vous savez quoi ? insista l’épicière à fleur de peau.
- Je ne veux plus de vous dans ma maison, gronda Horn en pointant les deux femmes de l’index.
- Ce n’est pas votre maison, corrigea Constance avec fermeté.
A ces mots, une lueur d’espoir illumina les yeux d’Isabella qui restait suspendue aux lèvres de son homologue féminin. Théodore, la tête appuyée contre le mur, les regardait tour à tour, la peur suintant par chaque pore de sa peau. "Voleur".
- Que savez-vous ? supplia Isabella en s’agrippant au bras de Constance.
- Rien ! Cette femme est folle ! vociféra Horn qui reprenait contenance.
- L’acte de propriété au nom de sa famille… vous êtes écœurant… arnaquer ces pauvres gens sur leur lit de mort.
- Je pourrais vous attaquer pour diffamation !
- Vous ne le ferez pas, vous auriez trop à perdre à pointer le projecteur sur cette vieille histoire.
- Ma tante disait donc vrai, intervint l’épicière en repensant aux notes laissées par Camille dans son journal intime.
Encore marquée par l’empreinte d’Eliane dans son esprit, Constance observa Isabella avec un sentiment de complétude et lui adressa un sourire empli de tendresse qui perturba sa destinataire. Le rouge qui lui montait aux joues trahissait son malaise.
- Cette maison appartient à votre famille.
- Foutaises ! rugit Horn. Ses grands-parents me l’ont léguée dans les règles.
- Vous avez profité de leur faiblesse, ils étaient malades ! enragea Isabella.
- Elle a raison, confirma Constance. Vous avez abusé de votre statut de maire de l’époque et votre femme aidait Camille en secret pour faire éclater la vérité.
- Je vous interdis de parler de ma femme, siffla le propriétaire au bord de l’implosion.
- Elle ne vous aimait pas, son cœur appartenait à une autre.
- La ferme !
Soudain la lumière se fit pour Isabella. Cet amour passionné que décrivait sa tante dans son journal sans jamais donner de nom… elle avait une liaison avec Eliane Horn ! Se pouvait-il que leur funeste destin soit lié ? Sans crier gare, Théodore se redressa et avança d’un pas menaçant vers l’ancien maire.
- Vous n’êtes pas le bienvenu ici, sortez, ordonna-t-il fermement.
Aussitôt, un souffle glacial s’engouffra dans les narines de Horn qui se mit à suffoquer. Il tituba jusqu’à l’extérieur de la maison où il s’effondra comme une poupée de chiffon suivi de près par l’homme au rat. Isabella, touchant au but, prit les mains de Constance entre les siennes pour attirer son attention.
- Dites-moi tout ce que vous savez, l’implora-t-elle.
La locataire prit le temps de lui décrire ses visions tout en prenant conscience que son don se développait malgré elle et toutes ses tentatives pour le réfréner.
- Ma tante aussi aimait les femmes, conclut Isabella sous le choc.
- Eliane était l’amour de sa vie, lui confia Constance. Et elle comptait bien faire tomber son mari pour abus de faiblesse et extorsion afin de restituer cette maison à votre famille.
- Mais tante Camille est morte et madame Horn a brutalement disparu avec son fils…
Tandis qu’elle finissait sa phrase, une silhouette diaphane apparut dans le salon comme flottant dans les airs. Contrairement aux fois précédentes, Constance conserva son calme, elle se sentait en sécurité. La cheminée.
- Viens avec moi, lança-t-elle à l’intention de l’épicière.
Faisant fi de ce tutoiement soudain, Isabella lui emboîta le pas et l’observa caresser les pierres de la cheminée. Elle imagina un bref instant les doigts longs et fins de Constance sur sa peau avant de se sermonner intérieurement. Cette femme l’intriguait, l’effrayait et l’attirait à la fois. Un sentiment assez perturbant dont elle faisait l’expérience pour la première fois. Une alchimie particulière provoquée par la maison ?
- Qu’est-ce que vous… tu fais ?
- Les réponses sont dans cette maison, se contenta de répondre Constance énigmatique.
Tandis qu’elle inspectait méticuleusement la cheminée, un bruit indescriptible leur parvint de l’extérieur.
***
A vous de jouer !
1) Isabella décide d’ignorer ce qu’elle entend et prête main forte à Constance
2) Les deux femmes se précipitent à l’extérieur
3)
Théodore apparaît sur le seuil de l’entrée les mains couvertes de sang
4) Les protagonistes sont soudainement pris d'un excès de folie